Theorie Actuelle


Comment surviennent la perte osseuse physiologique et l'ostéoporose ?

Pour expliquer les mécanismes de ces deux phénomènes, on propose à ce jour une théorie cellulaire. L'os ne peut utiliser le même mécanisme que la peau qui s'élimine continuellement et se renouvelle sans cesse en fabriquant une peau neuve. On suppose que l'os se détruit et se reconstruit sur place par petites unités, par petits bouts en quelque sorte.

Des cellules détruisent de petits morceaux lesquels sont reconstruits sur place par d'autres cellules. En somme, des ouvriers détruisent un pan de mur que d'autres ouvriers reconstruisent. Tout le mur n'est pas détruit à la fois. On fait le ravalement d'une partie de la façade - de ce qui est vieux - de sorte que le mur reste continuellement à l'état neuf. Ceci est vrai pendant une période de la vie adulte.

Toutefois, il a été dit plus haut que le V.T.O. comme la D.M.O étaient les plus hauts à la fin de la croissance du squelette, puis que la décroissance s'amorçait. Le mur reste toujours neuf mais diminue insensiblement. Pour rendre les choses plus claires, il faut dire que le mur diminue à la fois de hauteur et d'épaisseur.

En d'autres termes, les ouvriers qui détruisent le mur sont plus actifs que ceux qui reconstruisent. Il y a plusieurs hypothèses : les ouvriers qui détruisent peuvent soit travailler plus de trente cinq heures, soit travailler mieux, soit travailler plus vite, soit être plus nombreux que ceux qui construisent.

Comment choisir la bonne hypothèse ? Cela peut paraître - à priori - difficile voire impossible. Il n'en est rien. Il n'existe dans l'organisme, en effet, qu'un seul mécanisme connu qui "s'emballe" en quelque sorte. C'est le mécanisme qui produit de l'acide urique responsable des douloureuses et redoutées crises de goutte. Il n'y en a pas d'autre. On peut donc éliminer les trente cinq heures.
Que les destructeurs travaillent mieux ou plus vite ne change rien fondamentalement au problème puisqu'il est avéré que l'os disparaît au fil des ans. Le seul point important c'est la perte osseuse.

Le fait de proposer l'hypothèse d'une diminution de l'activité des ouvriers qui reconstruisent - soit parce qu'ils sont moins nombreux soit parce qu'ils travaillent moins vite constitue un aveu d'impuissance - tant sur le plan scientifique que philosophique. Nous y reviendrons.

Essayons de savoir pourquoi les ouvriers qui reconstruisent sont soit moins nombreux soit moins efficaces :

- Commençons par l'efficacité : Une explication triviale consiste à dire : il est plus facile de détruire que de bâtir. C'est vrai dans ce cas puisque les ouvriers qui détruisent utilisent des produits très actifs à base d'acides. Il suffit d'attaquer le ciment qui joint les pierres et le mur s'effondre. Une opération.

- Les ouvriers qui construisent ont besoin de monter les pierres puis de les assembler à l'aide de ciment. Deux opérations. C'est à la fois plus long et plus fatiguant.

Examinons la deuxième hypothèse : Pour quelle raison les deux "classes" d'ouvriers seraient-elles différentes ? Un nouveau-né a le même capital de cellules sanguines qu'un adulte ou qu'un homme âgé. Par contre, on sait que dès l'âge de huit ans, on commence à perdre des cellules cérébrales. Toutefois, à l'inverse de l'os qui se renouvelle, les cellules nerveuses disparues ne se régénèrent pas. Le capital acquis est définitivement acquis à la naissance. On sait aussi que les cellules cartilagineuses commencent à disparaître dès l'âge de douze ans. Elles ne se régénèrent pas pour les mêmes raisons que les cellules nerveuses.
Quelles que soient la ou les raisons, on constate que le mur s'effondre au fil du temps. Cela revient à poser le problème sur un plan philosophique : peut-on arrêter le cours du temps ?

Dans l'hypothèse où ce sont les ouvriers destructeurs qui prennent le dessus, quel qu'en soient les raisons, il est logique d'en débaucher. Ceux qui restent feront le travail au même rythme certes mais le mur se détruira moins vite, la reconstruction restant la même.
Cette hypothèse est séduisante. Elle est toutefois un aveu d'impuissance pour deux raisons :
- Ne sachant pas comment rénover le côté positif de la force, on tente de neutraliser son côté négatif.
- La deuxième raison, probablement la plus importante est que cette technique contient en elle sa propre limite, prélude à sa propre destruction.

Reprenons l'exemple du mur et des ouvriers. Que faut-il pour construire un mur. Il faut des pierres et du ciment. Il faut apporter sur place les matériaux et transporter les ouvriers. Il n'y a pas d'abris Algeco à côté ou sur un os. Il faut donc un moyen de transport. Il faut les rails et les wagons du train.

L'on a vu plus haut que les rails - les vaisseaux -étaient disposés à même l'os. Leur réseau est très développé puisqu'il faut un écartement de douze µ entre chaque rail pour "nourrir" correctement un tissu - c'est à dire pour apporter les ouvriers (les cellules) et les matériaux (sucre, graisses, protéines, oxygène et sels minéraux). Comment peut-on apporter ceux-ci lorsque les rails ont disparu et la ligne coupée ? Comment réparer un mur lorsque tout le bâtiment s'est effondré ?

Cette remarque en appelle une autre. Que devient la théorie cellulaire lorsque, pour les mêmes raisons d'impossibilité de reconstruire, on ne peut amener sur le site les ouvriers qui le détruisent ? Car la destruction osseuse se poursuit toute la vie.
Elle doit donc se poursuivre soit par l'opération du Saint Esprit, soit par un autre mécanisme. Abandonnons les choses de l'esprit et restons pragmatique. On a vu des flux de sang se déverser dans l'os détruit, des amas de sang se constituer. Que contiennent et que deviennent ces amas de sang ?

cf article suivant
Yves Cirotteau. Modifications morphologiques de la métaphyse fémorale supérieure
chez l'homme atteint de la maladie ostéoporotique.
C.R. Acad. Sci. Paris, Sciences de la vie/Life Science. 1999 ; 322 ; n°5 : 401-411

Un certain nombre de faits reste acquis :

- La théorie cellulaire est concevable dès le début de la perte osseuse. Ce phénomène débuterait donc très précocement, dès la fin de la maturité osseuse des sites explorés.

- Elle reste toujours concevable tant que les vaisseaux sont fonctionnels, couvrant de leur réseau les lamelles osseuses qu'elles détruiraient et reconstruiraient en y déposant les cellules. Il faut garder à l'esprit que le capital osseux diminue régulièrement chez l'homme et que la destruction s'accélère brusquement chez la femme à la ménopause.

- Elle est insuffisante à partir du moment où les fractures des lamelles osseuses, la constitution de "trous" dans l'intérieur de l'os interrompent la vascularisation et interdisent l'apport cellulaire sur le site.

- Il est évident, par voie de conséquence, que l'apport de " médicaments" par la bouche, à ce stade de la destruction osseuse, est totalement inutile.

- Il est non moins évident que seul l'apport localement - à l'intérieur de l'os - d'un matériau possédant toutes les caractéristiques d'un matériau biologique et ayant toutes les garanties de tolérance pour le corps humain, est la solution logique et exclusive. Il n'est pas imaginable de combler d'aucune autre manière les "trous" osseux liés à l'ostéoporose, encore moins les énormes pertes osseuses liées à la compression de l'os spongieux lors de la chute.