Le Traitement chirurgical préventif


Compte tenu de la qualité et de la reproductibilité des résultats obtenus dans les fractures du col du fémur, il était inévitable que se pose la question de la prévention de ces fractures.

Lorsque l'on connaît les données d'un problème, il est naturel de tenter d'y apporter une solution. Quelles sont-elles ? L'ostéoporose est certes - répétons-le - une maladie générale. Du point de vue de celui qui en souffre, seules les conséquences qui altèrent gravement sa santé sont à prendre en compte. Autant les fractures de côtes ou celles du poignet sont des incidents pratiquement sans gravité, dans la très grande majorité des cas, autant une ou plusieurs fractures vertébrales, une et, à plus forte raison, deux fractures du col fémoral vont grever lourdement la fonction et le plus souvent la vie du blessé.

Ceci doit être dit car grâce à une meilleure hygiène de vie, à certaines drogues ou techniques améliorant la longévité cardiaque, l'homme vit en moyenne près ou plus de quatre-vingts ans. Il est de notre devoir de thérapeute de lui permettre de vivre la durée de son âge dans les meilleures conditions possibles. L'une d'elles consiste à protéger la "station érigée". C'est le rôle de tous les traumatologues...

Prenons le cas de la hanche. Quels sont les faits connus (les données du problème) :

 

- Les études épidémiologiques sur l'ostéoporose ont montré l'incidence des premières fractures (du poignet et/ou des vertèbres) sur la survenue ultérieure des fractures de la hanche, et ont montré le risque de survenue de la fracture contro-latérale.


AUGMENTATION DU RISQUE RELATIF D'UNE FRACTURE
CONTRO-LATERALE EN FONCTION DE L'AGE
De 55 à 64 ans 35 fois
De 65 à 74 ans 12 fois
De 75 à 84 ans 4 fois
85 ans et plus 1,3 fois

 

- Les facteurs de risque sont connus (ethniques, alimentaires et environnementaux)

- Nous savons que l'ostéoporose entraîne une raréfaction osseuse atteignant le contenant (les parois ou os cortical) et le contenu (l'intérieur ou os spongieux)

- Les parois s'amincissent progressivement et diminuent d'épaisseur

- Le phénomène est plus complexe au niveau du contenu. La perte osseuse est de deux sortes entraînant :

 

soit une modification des travées osseuses (elles s'amincissent et diminuent en nombre)

 

soit de véritables trous (en nombre, de siège et de taille différents)
Afin de fixer les idées, prenons le cas d'une forêt. Il y a des arbres et des clairières. Les arbres sont les travées osseuses et les clairières sont les trous. On peut éclaircir les arbres, ils peuvent être d'âge différent. Il peut y avoir une ou plusieurs clairières, grandes ou petites.

 


- On peut mesurer quantitativement, non pas la perte osseuse, mais la perte de la composante minérale de l'os. On mesure la Densité Minérale Osseuse (D.M.O.) à l'aide de machines. On peut ainsi définir une quantité perdue, et la comparer avec la DMO d'un sujet jeune (dont la minéralisation de l'os est à son maximum, le T-Score) ainsi qu'avec la DMO d'une personne du même âge (le Z-Score)

- On a pu définir une quantité minérale osseuse perdue au-dessous de laquelle il y a un risque de fracture en cas de chute (ce seuil fracturaire est de 0,600 g/cm2)

- L'évaluation statistique du risque fracturaire en fonction de la perte minérale osseuse a été calculée

Il y a une trentaine d'années, on "attendait" la fracture du côté opposé. Il y a une trentaine d'années, on opérait de temps en temps des fractures de la hanche chez des personnes âgées de plus de quatre-vingts ans. Personne ne se précipitait pour le faire tant les résultats étaient décevants.
On ne peut pas, on ne doit plus aujourd'hui, avoir cette attitude passive et frileuse, compte tenu des renseignements que nous avons sur l'état de l'os.

Peut-on améliorer techniquement le diagnostic ?

Compte tenu de ce qui vient d'être dit, il est indispensable de connaître l'état densitométrique de l'os. Il serait - à l'évidence - trop aléatoire de compter sur la mesure de la DMO des deux hanches qui, par hasard, aurait été demandée quelques jours avant une fracture.

Il est impossible aujourd'hui - techniquement et pratiquement - de demander une densitométrie osseuse de la hanche opposée saine chez un patient qui vient de se fracturer la hanche.

Il suffirait pourtant qu'un grand groupe industriel d'imagerie médicale couple - soit en une soit en deux machines - une radiographie conventionnelle (pour la hanche fracturée) et une densitométrie tridimensionnelle (pour la hanche contro latérale) afin de pouvoir, sans déplacer le patient fracturé donc douloureux, étudier la fracture et mesurer l'état minéral de l'os sain.

Ainsi, pourrait-on, dans des conditions bien précises, traiter en même temps les deux hanches, à deux équipes, pour ne pas allonger le temps opératoire.

Quelle technique faut-il employer pour traiter préventivement ?

Dans l'état actuel des choses, la technique consiste à injecter une quantité variable de corail naturel à l'intérieur du col du fémur non fracturé. La densitométrie osseuse ayant donné - à titre indicatif - le siège où se trouve la plus grande perte minérale osseuse. On peut ainsi injecter de six à dix-huit grammes de corail naturel.

En savoir plus : technique d'injection du corail

Il est capital de souligner le point suivant : tant que le corail naturel n'est pas résorbé, la "solidité" de la hanche greffée ne sera en rien modifiée. En effet, ce n'est pas le fait d'injecter une "pierre" (même s'il s'agit d'un squelette de madrépore) prenons cette image et demandons pardon au corail - dans un os qui va en modifier la résistance lors d'un choc, du moins tant qu'il n'y aura pas de "connexion biologique" entre les deux...

Par contre, au fur et à mesure que le corail se transforme en os, la résistance mécanique de l'os greffé augmente. Lorsque la transformation est achevée, l'os nouveau et l'os préexistant à la greffe redonnent au fémur une solidité d'autant plus grande que la densitométrie osseuse est plus élevée.

Il faut donc prévenir l'opéré de cet inévitable délai qui correspond à la mise en oeuvre de phénomènes biologiques. Dès la greffe en place, il est fondamental de faire marcher l'opéré en appui complet. Il est fondamental qu'il marche le plus souvent et le plus longtemps possible. Pourquoi ? Parce que nous avons affaire à des phénomènes biologiques. Le corail naturel a besoin d'un apport cellulaire pour se transformer (se biodégrader). Seule la vascularisation peut apporter au coeur du biomatériau ces cellules. Tout le monde sait que l'exercice physique stimule et développe d'autant plus cette vascularisation qu'il est pratiqué régulièrement et de façon prolongée. C'est vrai pour tous les muscles - les cardiaques le savent bien - c'est aussi vrai pour l'os.

Oui à la marche, non à la chute les premiers mois suivants la greffe.

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