Insuffisances des théoriesSi l'accord semble être fait sur l'origine cellulaire de l'ostéoporose, à savoir que l'activité des cellules qui détruisent l'os (ostéoclastes) serait plus grande que celle des cellules qui le reconstruisent (ostéoblastes), il reste de nombreuses inconnues. Ce n'est pas notre propos de nous intéresser au point de départ de cette affection qui s'aggrave au moment de la ménopause. Les chirurgiens ont la charge de reconstruire l'os que la nature a détruit. Ils sont donc à l'autre bout de la chaîne. Ils constatent l'importance de la perte osseuse à la gravité de la fracture, à la quantité et à la qualité de l'os restant. Si la curiosité leur vient de faire un voyage à l'intérieur de cet os, ils constateront, parmi les autres manifestations destructrices, l'importance des phénomènes vasculaires. Ils ne sont pas sans ignorer, qu'un os sain saigne lorsqu'il est fracturé et que ce saignement est incontrôlable. Il ne peut leur échapper - empiriquement - qu'une fois l'hématome post-fracturaire évacué, un col du fémur ostéoporotique saigne relativement peu, surtout si l'intervention est faite à quelque distance de l'accident, mais qu'il saigne d'autant plus que l'intervention est rapide ( indépendamment des AC). Plusieurs questions viennent à l'esprit. Quelle est l'origine du saignement ? Le sang vient-il de la paroi, de l'intérieur de l'os, des déchirures musculaires, des gros vaisseaux péri-articulaires ? Dans le cas des fractures trochantériennes, le saignement vient essentiellement de l'os si la fracture est simple et peu ou pas déplacée ; de l'os et des parties molles péri-articulaires dans le cas de fractures complexes à grand déplacement. L'expérience prouve que le cercle artériel péri-articulaire n'est pratiquement jamais rompu. L'ostéoscopie a permis de mettre en évidence au niveau de la métaphyse fémorale supérieure, les faits suivants :
Il est vraisemblable qu'à chacune de ces situations correspondent des causes. On peut les imaginer à l'infini. Les petits vaisseaux peuvent être nécrosés. L'interruption des flux peut être du à des micro-thromboses. les plaques souples sont peut être le fait de la libération chimique des ions minéraux. Les points noirs sont peut être des micro-thromboses. La destruction des plaques minérales est-elle le seul fait de destruction cellulaire. A partir d'un certain stade, les éléments protéolytiques des hématomes n'entrent-ils pas en jeu ? Les hématomes ne jouent-ils pas un rôle dans la douleur des patients après une marche prolongée en raison de l'hyperpression qu'elle engendre à l'intérieur de l'os. Les lamelles osseuses de forme différente sont elles séparées les unes des autres par de simples phénomènes chimiques (rupture en bout de chaîne) et/ou bien faut-il y ajouter des phénomènes mécaniques (micro-fracture de fatigue)? Les formes boursouflées de certaines lamelles sont-elles le reflet des micro-fractures décrites par Maurice-Michel Forest ? Tout ce macrocosme, pourtant microscopique, doit être en premier lieu élucidé. Quel somme de travail en perspective ! Il faut laisser aux chercheurs fondamentalistes - à condition qu'ils ne fassent que cela - le soin de nous expliquer ce que nos esprits aliénés (c'est à dire différents) ne peuvent comprendre. Il faut reconnaître avec humilité nos insuffisances. Ils doivent nous informer de façon claire avec leur compétence. En sont-ils capables ? Il est évident, à ce stade de la destruction, qu'aucun médicament ne peut, sauf s'il est placé in situ, traiter cette maladie. S'il est vrai qu'un chirurgien ne peut appréhender - sauf quelques exceptions - les enseignements élémentaires de nos anciens maîtres (philosophes, mathématiciens, physiciens), il est encore plus improbable qu'il soit capable de comprendre le mystère encore mal sondé de la vie intramoléculaire. Qu'il se rassure, bon nombre de médecins - parmi les plus titrés - sont également écartés de la sainte table. Les chirurgiens doivent, par contre, tout connaître des difficultés techniques qu'ils vont rencontrer afin de pouvoir donner tout leur art pour les solutionner. Ceci est à leur portée de technicien. L'histoire ne pourra leur pardonner de passer à côté d'une amélioration technique. Ce n'est pas à des années-lumière de leur compétence. La solution est là. Combler les espaces vides, le faire avec un matériau compatible, résistant et qui servira de vecteur, de porteur de vaisseaux et de cellules dont l'os a besoin pour se reconstruire. Ils devront, dans le même temps, reconstruire l'anatomie, c'est à dire, s'en rapprocher le plus possible afin de minimiser les séquelles qui surviendront inévitablement - s'ils oublient. Quel challenge. Il faut souhaiter ardemment que les collègues, surtout les jeunes, prennent conscience que les personnes âgées sont la mémoire de l'histoire et qu'il est un devoir de les en remercier. Quel plus beau cadeau que de les rendre le plus longtemps possible autonome.
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